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Confédération des états du Sahel: pourquoi la descente aux enfers est inévitable

Les dirigeants des juntes militaires des trois états membres de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) ont posé ce Samedi 06 Juillet lors d’un sommet extraordinaire à Niamey au Niger, les jalons de la Confédération des Etats du Sahel. Une initiative qui intervient dans un contexte de rupture d’avec la CEDEAO. 

Hasard du calendrier ou pas, la naissance de cette confédération précède d’une journée le sommet de l’instance sous-régionale Ouest-Africaine prévue pour ce Dimanche 07 Juillet à Abuja au Nigéria. Pour les partisans de ces officiers arrivés au pouvoir suite à des coups d’états militaires, l’avènement de cette confédération Sahélienne marque un tournant, sinon une révolution dans la marche vers une pleine souveraineté de l’Afrique. Seulement, l’euphorie suscitée par la création de cette deuxième confédération dans l’histoire moderne de l’Afrique de l’Ouest, semble vouée à la désillusion. 

Les raisons de l’inévitable échec

Quatre éléments préfigurent de l’échec prévisible de cette nouvelle entité géopolitique. D’abord, les ambitions des trois personnages à l’origine de ce projet. Au Mali, rampe de lancement de la reconfiguration géopolitique de la sous-région, les conclusions du dialogue inter-Malien, formulées le 10 Mai dernier, recommandent une prolongation de la transition de deux à trois ans. 

Et comme il fallait s’y attendre, une possibilité pour l’actuel chef de la junte de solliciter les suffrages de ses compatriotes. A la tête du Burkina Faso depuis son putsch du 30 Septembre 2022 contre le régime militaire du Lieutenant-Colonel, Paul Henri Damiba, le Capitaine Ibrahim Traoré plus connu sous ses initiaux “IB”, est assuré de se maintenir au pouvoir en toute légalité jusqu’en 2029 selon les mesures fixées le 02 Juillet, à l’issue des assises nationales. 

Le Niger sans surprise devrait embarquer dans le même wagon en accordant un blanc-seing au Général Tiani pour pérenniser son pouvoir au sommet de l’état. Ici, ce que l’on note, c’est ce lien viscéral que ces différents putschistes développent avec l’exercice du pouvoir. Une tentation dangereuse à l’autoritarisme qui augure d’une crise de leadership aux ondes imprévisibles dans cette confédération naissante.

Autre danger qui guette la confédération des états du Sahel, la caporalisation des institutions qui sont déjà gravement phagocytées pour se mettre au service des hommes en treillis. Une confédération comme toute autre entité étatique, repose fondamentalement sur la solidité et la fiabilité de ses institutions. 

C’est la condition sine qua non qui puisse lui garantir une longévité au bénéfice des peuples. Or au Sahel, les institutions sont engluées dans un marasme désespérant en raison de l’absence d’un climat démocratique, unique gage de leur survie. A ce rythme, il ne serait pas surprenant d’assister à l’usure à des révoltes populaires condamnées à se conclure dans le sang. 

A cela, il faut ajouter l’insécurité terroriste qui met à nu les incompétences de ces officiers beaucoup plus en verve dans les salons feutrés de leurs capitales respectives, constitue indéniablement le danger le plus immédiat. Malgré les dénégations des régimes putschistes, c’est un secret de polichinelle: la situation se détériore sur l’ensemble des fronts. Et chaque semaine engendre son lot d’attaques et de carnages, la plupart dissimulés dans les médias publics. 

Jusqu’à quand la mascarade va-t-elle durer? Le soutien direct de la Russie de Vladimir Poutine ne semble que d’un piètre impact sur le terrain. 

Le rapport de forces à s’en référer aux données d’ACLED du mois de Juillet 2024, révèle une tendance décadente pour les armées nationales. Il faut par ailleurs craindre une structuration de ces mouvements insurgés dont les conséquences seraient tout simplement irréversibles pour les pouvoirs en place. 

Enfin, la fragilité des économies de ces trois états dont les PIB cumulés ne représentent que 10% du PIB global de la zone UEMOA. En outre, la contribution de la diaspora à la richesse de ces pays ayant en partage la tristement célèbre, zone des trois frontières, demeure considérable. D’elle dépend l’équilibre de milliers, voire de dizaines de milliers de familles. 

La région dispose certes d’énormes richesses minières et énergétiques. Mais leur exploitation viable dans le sens de la croissance de ces économies, n’est envisageable qu’avec un climat de stabilité tant sur le plan sécuritaire que politique. Ces conditions sont indispensables pour attirer des capitaux étrangers. 

De la poudre aux yeux

Pour un effet d’annonce, le pétard se montre suffisamment bruyant, déclenchant ça et là des crises d’hystérie au sein des populations de ces trois pays et même dans certains pays environnants où les images de foules en délire, enflamment les langues contre la France. Cependant, il faut bien le déplorer. Le populisme débouche toujours sur de profondes déceptions. 

Notons tout de même qu’entre autres résolutions majeures accouchées de ce sommet, l’on pourrait retenir outre le traité instaurant la création de la confédération, la désignation du putschiste Malien, Assimi Goïta en tant que président de la Confédération pour une durée d’un an, la mise en place d’un fond de stabilisation et la tenue de la première session parlementaire au Burkina Faso.

Raoul Mobio

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